La face cachée de la
libéralisation du marché des télécommunications
Chers lecteurs du site allo.ch,
Didier Divorne m’a gentiment permis de m’exprimer
sur un sujet de mon choix sous la rubrique "carte
blanche". Ce qui me permet de parler des conditions dans
lesquelles les opérateurs alternatifs évoluent en Suisse.
Tout d’abord, j’aimerais évoquer la
guerre des prix incessante sur ce marché, et les effets de
cette dernière. GTN étant l’un des premiers opérateurs
alternatifs en Suisse (1996 pour les entreprises), nous avons
un peu de recul par rapport à l’évolution des tarifs. En
effet, la chute des prix des télécommunications nationales
et internationales est l’une des plus spectaculaire en
Europe, tout ça bien sûr au profit des consommateurs. Le
prix de vente moyen de GTN a chuté de plus de 200% entre 1998
et aujourd’hui, et de plus de 100% entre le début de l’année
1999 et aujourd’hui. Quand on imagine que les prix sont
déjà en moyenne plus bas de 50% que Swisscom, on peut
imaginer à quels points les prix ont baissé pour les
consommateurs depuis la libéralisation du marché. Cependant,
la grande majorité des utilisateurs privés est restée chez
Swisscom, et continuent à payer le prix fort pour leurs
communications téléphoniques. Sommes-nous assez riches en
Suisse pour nous permettre d’ignorer les économies que l’on
peut réaliser en changeant d’opérateur ?
La perte de part de marché de Swisscom,
par rapport à Deutsche Telekom chez nos voisins allemands,
est infime, alors que les tarifs ont d’avantage baissé en
Suisse qu’en Allemagne. D’après moi, la première raison
de cette différence vient de la législation. En effet, en
Allemagne, un utilisateur n’a pas besoin de s’inscrire
auprès d’un nouvel opérateur pour utiliser ces services. Il
compose juste le code de l’opérateur avant son appel et il
reçoit son habituelle facture de Deutsche Telekom à la fin
du mois avec les appels effectués auprès du dit opérateur
alternatif. Chez nous, ce procédé n’existe pas car la loi
n’a pas été créée dans ce sens. Cet argument sera
bien-sûr réfuté par Swisscom, qui mettra en avant que la
Suisse est l’un des premiers pays à avoir imposé la
présélection, et que le nombre de présélections est plus
élevé prorata en Suisse qu’ailleurs.
Ce qui me permet d’introduire le
deuxième point que je voudrais couvrir, la présélection en
Suisse. Déjà que le coût d’acquisition de la clientèle
en Suisse est l’un des plus élevé en Europe, la
présélection est également l’une des plus chère au
monde. Les opérateurs alternatifs paient la
"modique" somme de Sfr. 29 par activation de
présélection, cadeau que nous vous faisons gracieusement en
tant qu’opérateur alternatif. Normalement, à ce prix, on
devrait par contre pouvoir s’attendre à un service
irréprochable de la part de Swisscom. Et bien
détrompez-vous, la présélection des clients avec Swisscom
est un vrai cauchemar… Alors que la loi oblige Swisscom à
activer un ordre de présélection en 5 jours maximum, il
arrive fréquemment que l’activation de ces ordres prenne
plus de trois semaines voire un mois ! A la limite si ce
n’étais que ça, ce ne serait pas aussi grave, mais parfois
les services de présélection de Swisscom font des
"erreurs", par exemple des clients qui ont signé un
contrat avec GTN se retrouvent présélectionnés chez Sunrise
ou chez un autre et vice-versa. Le résultat c’est que le
client ne peux plus téléphoner, et pour le consommateurs la
faute va toujours à l’opérateur avec lequel il a signé le
contrat et non pas chez Swisscom. Autre petite
"erreur" fréquente, des clients présélectionnés
chez GTN se retrouvent
" dé-présélectionnés " du jour au
lendemain alors qu’ils n’ont rien demandé, lorsque le
client reçoit par miracle une nouvelle facture Swisscom, il
nous appelle, et nous faisons le nécessaire auprès de
Swisscom qui s’excuse à chaque fois d’avoir fait une
"erreur", et qui rembourse la différence au client
(c’est bien normal). Par contre, c’est une perte sèche
pour GTN. Je pense que ces exemples expriment facilement le
climat qui règne.
Enfin, je vais m’arrêter là, sinon je
vais surcharger le serveur allo.ch avec quelques milliers de
pages de doléances.
Je voulais vous donner quelques exemples du
fonctionnement de cette libéralisation, de façon à ce que
vous vous rendiez compte de ce qui se passe en coulisse pour
que nous puissions vous satisfaire en tant que clients.
De plus, je profite de mon intervention
pour m’engager personnellement au nom de GTN à vous
satisfaire en tant que clients et non pas en tant "qu’abonnés",
quoi que cela implique comme sacrifice de notre part au vu des
difficultés que nous tous, opérateurs alternatifs, vivons
dans le cadre de cette libéralisation du marché suisse des
télécommunications.
Je remercie également Didier Divorne, pour
ce qui est maintenant devenu le site de référence des
télécommunications en Suisse, et qui nous permet de nous
exprimer librement sur ces pages.
David Marcus
Chairman & CEO
GTN Telecom
31.10.1999 |